Être parent en prison
Je suis bénévole au sein d’une association qui accueille les familles de détenus. Une fois par semaine, je tiens une permanence dans un local situé en face d’une maison d’arrêt. Je propose aux familles un temps d’échange autour d’un café. C’est un lieu transitoire avant la visite au parloir pour passer un moment ensemble, avec les adultes et avec les enfants. Il s’agit d’être présent auprès des membres de la famille du détenu tout en restant à leur écoute.
Dès lors, je me suis interrogé sur la question de la parentalité en maison d’arrêt. Je me souviens, lorsque j’exerçais en tant qu’éducateur spécialisé auprès d’enfant placés en foyer, des difficultés à entrer en lien avec un parent détenu et à permettre à ce dernier d’assumer son rôle et faire valoir ses droits envers son enfant.
Les droits du parent en prison
Il est important de rappeler que l’incarcération n’enlève en rien des prérogatives parentales du détenu et ne l’exonère pas de ses obligations, sauf décision judiciaire. Depuis la loi 2002-2 rénovant l’action sociale et médico-sociale, d’autres textes législatifs ont réaffirmé la place des parents et leur autorité sur leur enfant. L’idée principale des différents textes consiste à recueillir l’accord des deux parents et cela dans l’intérêt de l’enfant et quelque soit leur situation matrimoniale. D’ailleurs, la loi du 4 mars 2016 relative à la protection de l’enfance sécurise le parcours de l’enfant. Ainsi, telle que nouvellement définie, cette loi vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits.
Aujourd’hui, les parents incarcérés sont peu sollicités dans les prises de décisions concernant leur enfant. Que ce soit dans le cadre des mesures judiciaires ou administratives, ils ne sont pas toujours associés au projet de leur enfant. Le manque de personnel et la montée des prises en charge par l’Aide Sociale à l’Enfance fragilisent le maintien des liens entre l’enfant et son parent incarcéré, sauf si cela est contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant. En cas de conflit entre les parents, seul le Juge aux Affaires Familiales peut ordonner le maintien ou non des liens entre l’enfant et le parent incarcéré.
La question de l’enfant quand un père ou une mère est en prison
Il n’est pas rare que des enfants victimes souhaitent renouer des liens avec leur parent. L’éducateur doit alors proposer un cadre suffisamment sécurisant à l’enfant qui lui permette d’appréhender le parloir de façon sereine. L’environnement carcéral est un milieu à la fois rassurant (portiques de sécurité, personnel en uniforme, murs, etc) pour l’enfant victime mais également un milieu qui peut faire peur : hostilité des lieux, fouille, cris, etc. L’enfant doit être préparé à se confronter à un tel environnement avant et après le parloir.
L’absence d’un lieu de parole pour l’enfant afin d’exprimer ses affects et la séparation d’avec le parent détenu ne feront que entraver son développement affectif. Il en va de même pour le parent détenu. En effet, Il serait intéressant que ce dernier bénéficie d’entretiens au sein même de la maison d’arrêt afin d’aborder avec lui la séparation d’avec leur famille et la question de la parentalité.
Les travailleurs sociaux ont une responsabilité éducative et il en va de l’intérêt de l’enfant, si cela est avéré, de l’accompagner à maintenir des liens avec leur parent. J’ai parlé du parloir mais il y a d’autres modalités qui permettent de garder le lien avec le parent détenu. Le dessin, les courriers ou le téléphone pour n’en citer que quelques unes. Bien sûr, cela doit être évalué au cas par cas à la lumière du parent incarcéré et de la situation familiale.
De belles initiatives naissent ici-et-là avec de très bonnes pratiques. Une association belge appelé Relais Enfants-Parents, organise et encadre des visites et des groupes de parole dans les prisons ; cela permet d’améliorer les relations entre les enfants et leurs parents. Ci-dessous, une vidéo sur les actions menées par les professionnelles de cette association.