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Choix alimentaires : du sein maternel au sein de la famille

Pourquoi mange-t-on ?

L’acte de manger est naturel. Les aliments sont notre carburant. Ils permettent à nos cellules de se développer. Ce phénomène est possible grâce au microbiote situé dans notre système digestif. Ce dernier va transformer les aliments en minéraux, en vitamines, en lipides ou en glucides et permettre à nos cellules de se reproduire. Comme le dit l’adage, on est ce que nous mangeons

Mais nous pouvons dire aussi : on naît psychiquement de ce que nous mangeons.  Pour nous sensibiliser sur la vie psychique, Freud fait appel à la métaphore de la transformation cellulaire pour la question de l’introjection ; c’est-à-dire la prise en soi d’un élément extérieur. Il nous dit que la vie de la cellule, comme celle de la vie psychique, se maintient grâce à deux mécanismes fondamentaux : l’incorporation d’une matière étrangère et l’expulsion ou la projection, de matière propre à la vie psychique. Freud insiste sur le fait que Plus que l’objet, c’est le lien à l’objet qui est introjecté

Les marketeurs tentent d’orienter nos choix alimentaires en liant un objet à une émotion positive ou à une récompense. On peut citer les menus Happy Meal incluant des jouets.

clients dans une boutique

Les marketeurs usent, et parfois abusent, de concepts psychologiques pour mieux orienter nos choix alimentaires. Certains vont utiliser ce qu’il convient de nommer des biais cognitifs. Ceux-ci vont servir à modifier nos choix naturels. Nous pouvons en citer deux tels que :

  • Le paradoxe du choix : plus il y aura d’informations et moins votre décision sera efficace 
  • L’ effet de rareté : notre choix se tournera  vers un produit rare plutôt qu’un produit en abondance

La Pyramide de Maslow est également utilisée par les publicitaires afin de nous convaincre de choisir certains produits. En effet, ils vont associer un produit à l’un de nos besoins fondamentaux.  Ces derniers sont :

  • Besoins primaires : boire, manger, dormir, respirer
  • Besoin de se sentir en sécurité : en apposant des labels sur des produits pour nous signifier leur origine
  • Besoins de se sentir aimer et d’appartenir à un groupe : en nous présentant une famille qui se retrouve pour le petit déjeuner autour d’un produit laitier ou de céréales
  • Besoin d’estime de soi : en proposant des produits qui respectent notre image du corps
  • Besoin d’accomplissement : en proposant des produits qui vont signifier une certaine situation de réussite sociale

Quels sont les principaux facteurs influant sur le choix alimentaire ?

Des études sur les habitudes des consommateurs ont été menées par Michel et Boutani en 1992, par Thompson, Ling et Grunstein en 1994 et par Sirieix en 1999. Ces études ont déterminé les différents facteurs influant sur le choix alimentaire, à savoir :

  • Le facteur sensoriel : les consommateurs sont sensibles à l’aspect, la couleur, l’odeur, le goût ou encore la texture de l’aliment
  • Le facteur démographique :  nos choix alimentaires ne sont pas les mêmes à 10, 30 ou 70 ans
  •  Le facteur situationnel : selon le temps et le budget  que nous soyons  étudiant, salarié ou retraité, là aussi nos choix alimentaires sont différents
  • Le facteur social : La nourriture est une façon symbolique d’entrer en relation avec ses pairs, sa famille ou ses voisins
  • Le facteur culturel : Le choix alimentaire peut être le marqueur d’une identité où va se refléter les valeurs culturelles et cultuelles. En effet, certains aliments sont  interdits selon les préceptes religieux.

Cependant,  le Rapport mondial sur les crises alimentaires, dans son rapport annuel, indique que plus de 260 millions de personnes supplémentaires risquent de basculer dans la pauvreté extrême en 2022 à cause de la COVID-19, de l’accroissement des inégalités mondiales, du réchauffement climatique et du choc de la hausse des prix alimentaires.

Aujourd’hui, plus de 690 millions de personnes se couchent l’estomac vide et n’ont pas le luxe de faire des choix alimentaires. D’ailleurs, certaines familles en France vont choisir leur alimentation et manger responsable. Cette démarche s’inscrit dans un engagement humaniste.

Le choix alimentaire sous influence de facteurs psychologiques

Certains facteurs psychologiques pèsent sur les choix alimentaires des individus. Ils peuvent être divisés en deux catégories : 

  • les mécanismes psychologiques d’activation qui concernent les émotions, les motivations, ou les attitudes. Mais également le Système d’Attachement : La théorie de l’attachement permet d’étudier la façon dont l’enfant fait face à une situation stressante, et dans la manière dont il va demander et obtenir du réconfort de la part d’une figure d’attachement. 
  • les mécanismes cognitifs qui concernent les perceptions ou les processus d’apprentissage. Ces mécanismes cognitifs jouent un rôle important dans nos choix alimentaires. Ils vont mesurer les risques de ce que l’on mange liés au degré d’information dont nous disposons sur le produit (Rozin, 1981).

Parmi les mécanismes cognitifs, nous pouvons également citer les représentations mentales. 

Les représentations mentales : c'est quoi ?

On peut dire que les représentations mentales sont définies comme des structures dans notre esprit qui vont illustrer, imager nos préférences ou nos dégoûts alimentaires. Pour illustrer ce que sont les représentations mentales, nous pouvons  reprendre un extrait du livre intitulé Du côté de chez Swann où le narrateur, en mangeant une madeleine, retourne en enfance et dit :  Mais à l’instant même où la gorgée  des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d’extraordinaire en moi.

Ce passage mais en évidence le souvenir gustatif de la madeleine à travers son parfum qui ravive les souvenirs du narrateur. Mais au-delà de la madeleine,  le sujet revit affectivement, dans une sorte de réminiscence, la relation affective qu’il a eu avec sa tante Léonie : il se l’est représentée entrain de lui tendre cette madeleine. 

 

Proust

 

Certains plats que nous mangeons sont associés à des souvenirs précis. Dans cet extrait du film d’animation intitulé Ratatouille, le critique gastronomique retourne en enfance en mangeant une bouchée d’une ratatouille. Ce plat était celui que sa mère lui préparait lorsqu’il était enfant.

 

 

Les choix alimentaires sont à mettre en lien avec des émotions agréables ou désagréables. D’ailleurs, cela se joue dès les premiers échanges entre la mère et l’enfant lors de l’allaitement notamment. 

Allaitement : s’alimenter s’est éprouver de la satisfaction

 

L’allaitement est une expérience orale qui concentre toutes les expériences émotionnelles et sensorielles. Durant l’allaitement le bébé bénéficie de contacts chaleureux et d’échanges gratifiants. Durant ce temps le parent le regarde, lui sourit et le rassure. Dès lors, Le bébé se sent en sécurité et introjecte en lui l’image d’une mère sécurisante.  A son tour, la mère, voyant son enfant satisfait et calme, va à son tour introjecter un bon bébé et se sentir un bon parent. 

 

Une mère allaitant son enfant

 

Dans ces premiers échanges entre la mère et le nourrisson, le désir de manger a pour objet la nourriture et la relation avec la personne qui donne la nourriture. Plus que l’objet, c’est le lien à l’objet qui est introjecté nous dit Freud. D’ailleurs, le bébé va s’identifier aux ressentis agréables lors de la tété : on parle d’identification introjective. Le Moi du bébé va s’identifier à ce qu’il introjecte de bon et d’agréable symbolisé par le lait maternel et la qualité des liens proposée par le parent. Le bébé qui tète sa mère est dans une dynamique pulsionnelle. Il découvre l’excitation bucco-linguale qu’il va reproduire par le suçotement des lèvres ou du pouce. L’objectif est d’apaiser les tensions liées à la faim. Mais cela ne peut se faire que si le nourrisson se sent en sécurité avec la figure d’attachement dont il dépend. Si la figure d’attachement est stressée ou souffre de dépression alors des troubles de l’attachement peuvent apparaître chez le bébé et mettre à mal ses choix alimentaires.

 

Qu'est-ce-que la figure d'attachement ?

John Bowlby, psychanalyste anglais, fondateur de la théorie de l’attachement, s’est très tôt intéressé à la manière dont l’enfant gère le stress lié à la séparation avec son parent : sa figure d’attachement. Selon l’auteur, le système d’attachement est un besoin primaire fondamental : au même titre que boire, manger, dormir et respirer. Il a pour but de favoriser un sentiment de sécurité interne face aux situations stressantes liées à son environnement.

C’est la répétition des expériences de réconfort, par le parent, en situation de détresse qui permet au bébé un sentiment de sécurité interne important. C’est parce qu’il éprouvera un sentiment de sécurité interne qu’il pourra explorer explorer le monde qui l’entoure. Par ailleurs, le système d’attachement est actif tout au long de la vie

Ainsi, à l’adolescence, la fragilité de ce système d’attachement peut générer des comportements alimentaires de types pathologiques. 

 

Les adolescents et la junk food



Le choix alimentaire des adolescents

 

L’adolescence est une période charnière où le corps se transforme. Ce dernier a des besoins spécifiques en termes d’alimentation. A l’adolescence deux enjeux majeurs sont à l’œuvre : celui de l’identité et celui du corporel. Pour se sentir “être au monde” l’adolescent va devoir se séparer de ses parents. Cela va générer beaucoup d’angoisses qu’il faudra réguler et apaiser. En effet, certains adolescents en proie à des souffrances psychiques vont avoir un fonctionnement régi par une compulsion. Ils ne peuvent pas faire autrement que de manger trop quand ils sont boulimiques ou ne plus manger quand ils sont anorexiques. La contrainte psychique interne amène certains adolescents à la compulsion alimentaire

L’ adolescence est un moment de crise où la question de la sexualité s’impose au jeune sujet. Une question qui amène des doutes. L’adolescent doit se séparer de ses parents pour pouvoir se construire une individualité. Ainsi, certains jeunes  sujets ne vont pas hésiter à manger de la malbouffe pour se distinguer des repas équilibrés proposés par leurs parents. D’autres jeunes adultes, qui font leurs études dans une autre ville, peuvent douloureusement supporter la séparation. Certains rempliront le vide affectif en mangeant ou tenteront de trouver du réconfort à travers les plats préparés par les parents. 

Nos choix alimentaires sont orientés en lien avec ce qui est bon pour notre corps. Notre choix est le reflet de notre identité, de notre vie émotionnelle et sensorielle avec notre figure d’attachement.  Une figure qui a su nous apporter suffisamment de sécurité interne pour nous permettre de gérer les situations stressantes au risque de développer des Troubles  Compulsifs Alimentaires : anorexie, hyperphagie et/ou boulimie. 

 

Conférence sur les choix alimentaires (vidéo)

Dans le cadre d’un conférence organisée par l’Association Départementale d’Education Sanitaire et Sociale  de l’Ain, j’ai eu l’occasion d’intervenir sur le thème de l’évolution des comportements alimentaires au regard des Programmes  Nationaux Nutrition Santé.  Vous pouvez retrouver mon intervention grâce à la vidéo ci-dessous.

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