En France, l’obésité ne cesse d’augmenter. Une enquête récente de la Ligue contre l’Obésité montre qu’une personne sur deux est en surpoids. Si les symptômes somatiques liés à l’obésité sont largement évoqués, on parle moins des symptômes psychiques. Je souhaite vous aider à mieux comprendre ceux-ci en répondant à quelques questions dans cet article :
L'obésité, c'est quoi ?
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit le surpoids et l’obésité comme une accumulation anormale ou excessive de graisse corporelle qui peut nuire à la santé. L’indice de masse corporelle (IMC) est une mesure simple du poids par rapport à la taille couramment utilisée pour estimer le surpoids et l’obésité chez les populations et les individus adultes. L’OMS définit le surpoids par un IMC égal ou supérieur à 25 kg/m2 et l’obésité par un IMC égal ou supérieur à 30 kg/m2. En France, une enquête épidémiologique sur le surpoids et l’obésité a été menée par l’institut de sondage Odoxa. Cette dernière nous enseigne qu’en 2020, 47 % des français étaient en situation de surpoids et/ou d’obésité.
Si, pour certains, l’obésité et le surpoids sont vécus comme une insulte à leur personne, d’autres les considèrent comme une armure pour les protéger du monde environnant. Cependant, certaines personnes ont fait de leurs formes une force. En effet, des individus en surpoids se sont lancés dans la musique ou dans le mannequinat. L’écrivaine et journaliste Caroline Idoux a fait une intervention pour les conférences TED où elle démonte les clichés et les idées reçues sur l’obésité. A travers la vidéo proposée ci-dessous, la journaliste nous apporte un autre regard sur les personnes en surpoids et n’hésite pas à interroger ceux qui les dévisagent et qui les jugent au quotidien.
En effet, un grand nombre d’enfants en surpoids sont la cible de moqueries de la part des autres élèves. Ils sont souvent désignés comme le souffre douleur et reçoivent des coups. D’autres élèves en surpoids deviennent les boucs émissaires de leur école et subissent du harcèlement scolaire ou encore des moqueries. C’est l’ensemble de ces blessures physiques et psychologiques vécues à l’école, et parfois au sein même de la famille qui amène la plupart des personnes obèses à ne pas s’assumer et à ne pas s’aimer pas une fois adulte. Ils culpabilisent sur leur état d’être et cela a un impact sur leur moral. Lorsque le dégoût de soi est trop fort, certains ne supportent ni la balance, ni l’image que leur renvoie le miroir.
Les facteurs de risque liés à l'obésité
Les facteurs favorisant la prise de poids sont multiples. En effet, des facteurs biologiques, sociaux et environnementaux sont à l’œuvre. Mais pas que ! La prise de poids peut également être liée à un vécu traumatique dans l’enfance. Un vécu d’abus sexuel, d’abandon parental, d’humiliation, ou alors la perte d’un être cher peuvent altérer notre rapport à l’alimentation. Ainsi, se nourrir ne devient plus une source de plaisir mais un besoin nécessaire soit pour combler un vide affectif, soit pour renforcer son corps et mieux lutter contre les agressions extérieures : qu’elles soient d’ordre physiques ou psychiques.
La Haute Autorité de Santé dénombre différents facteurs de risques tels que :
- Facteurs alimentaires : boissons sucrées, apports énergétiques excessifs
- Facteurs génétiques et antécédents familiaux d’obésité
- Arrêt de l’activité physique, sportive et sédentarité
- Arrêt du tabac
- Alcool
- Médicaments
- Stress au travail
L’ensemble de ces facteurs entraîne un surpoids chez le patient qui a un impact sur la vie affective, sociétale et professionnelle.
Quelles sont les conséquences sociétales et professionnelles de l’obésité ?
La société actuelle, notamment à travers les publicités, exige des femmes et des hommes une certaine minceur. Cela reflète une personne qui sait prendre soin d’elle en limitant les excès. Pourtant, au XIXème siècle, les rondeurs marquaient une forme de richesse. La femme enrobée incarnait la beauté. Aujourd’hui, les personnes dites obèses sont stigmatisées et sont marquées dans leur vie psychique d’un sentiment de dépit, voire de résignation. En effet, la stigmatisation repose sur l’idée que la personne en surpoids manque de volonté, qu’elle est fainéante, qu’elle pue ! Ces types de stigmates ont des conséquences sur l’estime d’une personne et peuvent décourager cette dernière à s’inscrire dans un parcours professionnel. D’ailleurs, la personne atteinte d’obésité rencontre des freins à l’embauche et peuvent souffrir de discrimination.
Jean-François Amadieu, professeur à l’université Paris 1 et directeur de l’Observatoire des discriminations indique que certains employeurs vont refuser d’embaucher des personnes obèses car ils recherchent une personne qu’ils considèrent en mesure de séduire la clientèle. Il ajoute qu’en 2001, la loi relative à la lutte contre les discriminations a ajouté à la liste des discriminations interdites, l’apparence physique. Sur ce critère, l’obésité et le surpoids figurent parmi les premières causes de discrimination. Ainsi, certains métiers dans le milieu de la restauration ou de l’accueil sont rarement accessibles aux personnes atteintes d’obésité.
Quel est l’impact de l’obésité sur la vie affective ?
Un corps trop gros est un corps qui limite et qui empêche de pratiquer certaines activités. Or, les activités sont un des moyens à la socialisation et aux partages d’émotions. Les activités physiques et sportives nous permettent d’apprivoiser notre corps, de le contenir et de le maîtriser. Lorsque nous sommes obèses, c’est le surpoids qui dicte nos actions et qui limite notre désir : cela crée de la frustration et un sentiment d’impuissance. Dès lors, une personne en surpoids préférera renoncer plutôt que de rencontrer l’échec. Certes, la vie est faite d’échecs mais beaucoup de personnes en situation d’obésité ont connu l’échec soit à travers leur relation amoureuse, soit en situation professionnelle, soit à travers des régimes alimentaires. Si le gras entoure leurs corps, l’échec devient une seconde peau qu’il est difficile de supporter. Par ailleurs, un corps en surpoids est un corps qui entraînera son lot de complications cutanées, ostéoarticulaires, respiratoires…
Enfin, le dégoût de soi altère la vie sexuelle qui génère une souffrance. Face à cela, le ou la conjoint.e ne peut ni comprendre la raison de ce dégoût, ni comprendre pourquoi la personne aimée telle qu’elle est veut devenir différente. Il n’est pas rare de constater que bien souvent les personnes dites obèses ont plutôt tendance à ne pas s’attacher ou à rompre avant de rencontrer à nouveau le sentiment d’échec.
Pourquoi la personne atteinte de surpoids et/ou d’obésité devrait-elle consulter un psychologue ?
Le rôle d’un psychologue est d’accueillir la douleur psychologique de l’obésité sur le moral. En effet, la culpabilité, le dégoût ou la honte de soi forment des sédiments négatifs dans lesquels on s’enlise. Le psychologue clinicien a les outils nécessaires pour aider les personnes souffrantes à sortir de cet enlisement. L’idée n’est pas d’aider à perdre du poids, mais d’identifier, puis d’apaiser ce qui fait souffrir l’être. Certaines personnes atteintes d’obésité ont fait le choix de s’accepter telles qu’elles étaient. Elles ont mis en échec tous ceux qui ont voulu les réduire à leur corps. Elles ont accepté leur différence et ont assumé leur corps sans se sentir coupable de ce qu’elles étaient.